Écho à Jacques
(Coup d’oeil sur le temps)
Merci pour ces vers si pertinents d’André Foubert
Mon Dieu d’entendre ces noms me renvoie bien loin dans le passé!
Nous étions de jeunes adultes au corps ferme aux traits harmonieux
Comme est intrigant le temps qui semble passer qui semble vieillir!
L’humain se lamente sur ses jours qui filent On le comprend le pauvre!
Il y a à peine quelques clignements d’yeux il était encore
Dans sa deuxième ou dans sa troisième décennie
Or voilà qu’il est déjà dans la huitième ou la neuvième!
Devenu plus vulnérable il peut à tout moment s’éteindre!
Il est à peine apparu au grand jour qu’il doit déjà disparaître!
Ah il est si bon d’être dans la vie! Or déjà on doit plier bagage!
Comme ce constat inévitable les désole lui et son entourage!
Ignorant la nature du temps il se sent tellement insignifiant
Quand il compare la durée de sa vie à l’âge de la terre ou de l’univers
Pour ma part je suis praticien de la lenteur
Lorsque je marche je m’arrête de temps en temps
Je m’arrête je me retourne Depuis une autre perspective
Je vois la réalité déjà visitée mais renouvelée étonnante
Je suis toujours surpris du paysage qui s’offre
Comme un cadeau à l’œil qui renonce à l’usuel
Je prends donc plaisir à regarder aussi en arrière
Par exemple au temps du film Palaver 4 au temps d’Expo 58
Au temps de ma première fugue quand j’avais à peine 4 ou 5 ans
Et je revois ma mère répudiée qui venait me voir en cachette
Quand je pense à cela quand je revisite ces temps-là
Quand je réentends les musiques entendues et chantées
Quand je revois les visages et les paysages de l’époque
Tout cela est très loin! Il y a vraiment très longtemps!
Quand je regarde mon itinéraire jusqu’à présent
Si touffu si complexe commencé au Congo Belge
Et qui ne représente pourtant qu’une fraction des événements vécus
Tout cela est très loin! Il y a vraiment très longtemps!
Pour le dire autrement j’ai cessé de me préoccuper du temps qui reste
Sachant qu’il est toujours abondant sachant que mon domaine intérieur
N’est mesurable ni en longueur ni en largeur ni en hauteur
Sachant qu’il n’est limité ni par l’espace ni par le temps
Quand je regarde le temps déjà vécu quand je rejoins mon enfance
J’apprends que le temps est une donnée absolument relative
Je me rends compte que je viens de l’éternité et y retourne
Je me réjouis d’avoir accès en tout temps à l’absence du temps
Quand je construis mon lukàsà je fais l’expérience étrange et exquise
De descendre au plus profond de moi là où gît le noyau adamantin
Que le suceur de sucre occidental au cœur pétrifié ne sut jamais détruire
Source de la force inébranlable de Muhammad Ali l’Indomptable
Cette zone intime n’est limitée ni par l’espace ni par le temps
Il suffit de la visiter pour se surprendre à nager et à voler
Libre de la pesanteur libre de toute crainte propres aux gens de la surface
Voilà un lieu fait d’énergie et de beauté où l’idée même de la mort est inconnue
4 Jacques et moi, nous avons joué dans le film d’Émile Degelin portant ce titre, en 1968.