Échange avec un inconnu
Me voici Kabuta-wa-Ndaayà L’Éphémère Contingence surgie dans la vie fragile
Selon je ne sais quel algorithme Tantôt attentif tantôt distrait
Je pourrais disparaître d’un moment à l’autre
Et regagner le Silence dont je suis issu
Je pourrais en un clin d’œil quitter la vie aventure phénoménale
Et me réduire à quelques traces à travers des mots épars dits noms poétiques
J’ai la faculté de m’incarner et de me désincarner à tout instant
Voici quelques événements survenus entre le 8 et le 12 août 2021
Et qui montrent la vie dans ce qu’elle a de plus inattendu de plus surprenant
Je dédie ces mots à Madeleine Timmermans la Sage-Femme
Sœur de la forêt et des rivières nièce des saumons et des cerfs
La Vivante exemplaire Celle-qui-se-laisse-modeler-par-la-poésie
Celle qui sait que la vie quelle que soit sa durée et son support
Mérite d’être vécue arrosée et aérée renforcée et célébrée
C’est le soir d’une superbe journée estivale Je termine ma marche quotidienne
Le long du fleuve et de la rivière fraternels véritables bénédictions pour l’âme
Qu’ils sont fortunés les Rimouskois d’être si bien entourés si bien portés !
Je m’apprête à traverser la chaussée J’attends que les feux m’y autorisent
Un homme d’environ 70 ans arrive Nous nous saluons
Il me dit en appuyant sur le dernier mot :
« Vous êtes BEAU ! Vous êtes BEAU ! » Je suis surpris
Nous échangeons juste deux ou trois mots le temps de traverser la chaussée
C’est-à-dire une quinzaine de secondes ! Une fois sur l’autre trottoir
L’inconnu intriguant continue son chemin et moi le mien !
Je m’examine pendant plusieurs minutes Je ne vois pas ce qu’il lui semble si beau
Je ne trouve rien de spécial à mon sujet : Je suis habillé comme tout le monde
Je subis comme tout le monde l’agression du temps ! Je finis par me dire :
« Ce ne peut être que mon visage » Justement je ne peux le voir moi-même
Le meilleur miroir du monde ne saurait jamais me le montrer réellement !
Quelle expérience ! C’est donc l’autre qui m’informe sur moi-même !
C’est l’autre qui me révèle à moi-même ! Et de me remémorer ce proverbe bantu :
« Umuntu ngumuntu ngabantu » Je n’existe que par la médiation de l’autre
Autrement dit l’autre est témoin de mon existence !
À ma naissance il me donne un nom pour attester que j’existe
Quant à moi je le crois Je consens à lui faire confiance !
Je perçois chez lui une invitation bienveillante à être fidèle à ce qui transparaît
L’invitation à prendre soin de ce qui me dépasse J’accepte la responsabilité
D’héberger cette présence plus grande que moi
Ce passant fait de moi un modèle de beauté Il fait un idéal de l’être que je suis !